Les causes de la violence

Une question de sexe ?

Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi certaines caractéristiques sont attribuées davantage à un sexe plutôt qu’à l’autre, sans tenir compte de l’individu ? Si on vous dit le mot « virilité », à qui pensez-vous instinctivement ? À une femme ou à un homme ? Et en ce qui concerne le mot « douceur », quel est le premier genre qui vous vient en tête ? Masculin ou féminin ? Il y a de fortes chances pour que vous ayez pensé à un homme pour le premier exemple et à une femme pour le deuxième. À la naissance, la petite fille hérite d’un manteau rose qui lui apprend la nécessité d’être gentille, douce, soumise, de dire oui, d’être en harmonie à tout prix, d’être au service des autres. Bref, de faire passer les besoins des autres avant les siens. Le petit manteau rose va tellement bien à la fillette qu’il finit par lui coller à la peau. De son côté, le petit garçon, à sa naissance, hérite d’un manteau bleu qui lui apprend la nécessité d’être fort, de s’affirmer, de foncer, de ne pas exprimer ses émotions, d’être viril, de se tenir debout. Lui aussi, il apprécie tellement son manteau que le vêtement finit par lui coller à la peau. On parle ici de socialisation, d’éducation stéréotypée ou sexiste.

La socialisation sexiste crée des inégalités qui expliquent pourquoi une femme risque plus de subir de la violence qu’un homme. Les stéréotypes engendrent des perceptions qui stigmatisent le rôle des hommes et des femmes. La colère, par exemple, est mieux acceptée chez le sexe masculin que féminin. Cette émotion est en effet mal vue chez la femme, et l’expression de celle-ci par une femme est associée davantage à la perte de contrôle qu’à l’affirmation. Au lieu d’exprimer sa colère, la femme va extérioriser sa tristesse, sa culpabilité, ce qui est plus acceptable socialement. Combien de fois pouvons-nous voir une femme manifester sa colère en pleurant ? Avez-vous remarqué que, lorsqu’une fille ou une femme adoptent des attitudes et des comportements typiquement réservés aux garçons ou aux hommes et qu’elles s’octroient ce droit, il est fréquent qu’elles se fassent traiter de folles parce que cela ne fait pas l’affaire des hommes contrôlants ? Que se passe-t-il lorsqu’il y a un écart ou une différence entre ce que la personne choisit d’être et les attentes que la société nourrit envers elle ? La société utilise des stratégies d’agression qui amènent la personne à ressentir de la culpabilité, du doute, de la honte et de la peur. Il devient tentant pour la personne de se mouler, de corriger ses comportements et ses attitudes pour correspondre aux attentes de la société, croyant ainsi arriver à faire diminuer le sentiment d’impuissance créé par ces émotions. Que ce soit en société ou dans une relation conjugale, nous assistons au même phénomène. Bref, comme l’écrit Susan Schechter : « Cette violence est socialement construite et individuellement choisie[1]. »

La socialisation peut créer des attentes et un sentiment d’obligation de se conformer à ce que sont un homme/garçon et une femme/fille. L’égalité des sexes passe par l’égalité des besoins et des droits. C’est le meilleur moyen de prévenir la violence dans les relations conjugales.


[1] Casser la vague — Une réponse aux arguments sur la prétendue symétrie de la violence conjugale. Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.